vendredi 21 décembre 2012

Les magnifiques Lamentatione de Haydn par l’Ensemble baroque de Limoges à l’occasion du Jeudi Saint



L’Ensemble baroque de Limoges, dirigé par Christophe Coin, a proposé à l’Opéra-Théâtre de la ville un programme adapté à la Semaine Sainte, avec l’Introduction des 7 dernières paroles du Christ en Croix, la Symphonie n°49 en fa m "La Passione", le Stabat Mater, aria "Fac me vere tecum flere" ; Franz Beck, Stabat Mater ; et J. Haydn, Symphonie n°26 en ré m, Lamentatione. Interprétées magnifiquement, ces compositions aident par leur beauté à méditer à la fois sur les souffrances d’un homme qui se proclama Messie, mais d’une manière générale sur les douleurs de tous les hommes. Haydn se souvint-il, en écrivant ces lamentations du temps où, misérable, il arpentait le pavé de Vienne et jouait à l’occasion de quelques enterrements ? Le voici visionnaire jusqu’aux rives sombres du Léthé. Symphoniste sa carrière durant, le voici aussi, avec la n° 26 parfaitement jouée par l’Ensemble des 19 musiciens, entre baroque et prémices du romantisme.
            Nous écoutons, nous rêvons, nous sommes transportés à nouveau vers Jérusalem et cette question terrifiante : « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » - tout est dit, n’est-ce pas, dans des glissements de violons et de violoncelles, du mystère absolu. Vers où part cet homme que l’on ne retrouvera pas au tombeau ? Et nous, où allons-nous ? Mais la voix de la mezzo Guillemette Laurens, grande femme brune agrippée à son pupitre, qui fut longtemps associée aux Arts florissants, est déjà comme une promesse de rédemption, comme un bonheur possible au plus profond des ténèbres. Voici la passion dans toute son incandescence lyrique ! Stabat Mater dolorosa... nous voici si proches de Marie pleurant son fils crucifié, comme le voulurent les franciscains du 13ème siècle. Nous voici auprès de toutes les mères pleurant leurs enfants, à Gaza dans les décombres, en Italie au milieu des ruines d’un tragique tremblement de terre.
            Au moment où des catholiques limousins, promenant ostensiblement des restes de Saints sur des litières, évoluent entre religion et superstition populaire, nous sommes, avec Christophe Coin et ses musiciens, avec Haydn surtout, au coeur des interrogations essentielles : doute et foi, souffrance et espoir, magnifiés par l’art au plus haut point.

            10 avril 2009.

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