L’Ensemble baroque de Limoges, dirigé par Christophe Coin, a proposé à
l’Opéra-Théâtre de la ville un programme adapté à la Semaine Sainte, avec l’Introduction
des 7 dernières paroles du Christ en Croix, la Symphonie n°49 en fa m "La
Passione", le Stabat Mater, aria "Fac me vere tecum
flere" ; Franz Beck, Stabat Mater ; et J. Haydn, Symphonie
n°26 en ré m, Lamentatione. Interprétées magnifiquement, ces compositions
aident par leur beauté à méditer à la fois sur les souffrances d’un homme qui
se proclama Messie, mais d’une manière générale sur les douleurs de tous les
hommes. Haydn se souvint-il, en écrivant ces lamentations du temps où,
misérable, il arpentait le pavé de Vienne et jouait à l’occasion de quelques
enterrements ? Le voici visionnaire jusqu’aux rives sombres du Léthé.
Symphoniste sa carrière durant, le voici aussi, avec la n° 26 parfaitement
jouée par l’Ensemble des 19 musiciens, entre baroque et prémices du romantisme.
Nous écoutons, nous
rêvons, nous sommes transportés à nouveau vers Jérusalem et cette question
terrifiante : « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’as-tu
abandonné ? » - tout est dit, n’est-ce pas, dans des glissements
de violons et de violoncelles, du mystère absolu. Vers où part cet homme que
l’on ne retrouvera pas au tombeau ? Et nous, où allons-nous ? Mais la
voix de la mezzo Guillemette Laurens, grande femme brune agrippée à son
pupitre, qui fut longtemps associée aux Arts florissants, est déjà comme
une promesse de rédemption, comme un bonheur possible au plus profond des
ténèbres. Voici la passion dans toute son incandescence lyrique ! Stabat
Mater dolorosa... nous voici si proches de Marie pleurant son fils
crucifié, comme le voulurent les franciscains du 13ème siècle. Nous
voici auprès de toutes les mères pleurant leurs enfants, à Gaza dans les
décombres, en Italie au milieu des ruines d’un tragique tremblement de terre.
Au moment où des
catholiques limousins, promenant ostensiblement des restes de Saints sur des
litières, évoluent entre religion et superstition populaire, nous sommes, avec
Christophe Coin et ses musiciens, avec Haydn surtout, au coeur des
interrogations essentielles : doute et foi, souffrance et espoir, magnifiés
par l’art au plus haut point.
10 avril 2009.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire