lundi 11 avril 2016

La vie coule, de Marc Bruimaud, chez Jacques Flament Editions (2016)


L'écrivain Marc Bruimaud, installé à Limoges, propose, après Makolet l'an passé chez le même éditeur, La vie coule, des "récits sentimentaux" sans doute autobiographiques, rejoignant avec talent les auteurs d'auto-fiction. Si le titre trouve son origine dans une sorte de long poème concluant le livre ("Parce que, avec toi, la vie coule"), on songe aussi à la vie qui s'écoule (à défaut d'être toujours cool), c'est-à-dire au fameux tempus fugit, et à Héraclite. Marc Bruimaud est ici à la recherche du temps perdu (le thème de l'enfance affleurant d'ailleurs en permanence dans son texte), mais plus sous l'égide d'Annie Ernaux que de Marcel Proust.
Il est donc question de ses amours, de ses relations - parfois adultères - avec Marie, Dolores, Rosie, Emma, Minnie et quelques autres, avant "plus personne". Elles sont racontées avec une sorte d'objectivité où les détails ont une importance certaine: marques, lieux, objets... nourrissent précisément le discours amoureux et lui confèrent une poésie faussement prosaïque, d'autant plus que l'écrivain aiment dérouler des listes qui deviennent des sortes de poèmes. Le texte est aussi enrichi - sans jamais peser - de nombreuses références au cinéma et à la littérature, mais aussi à la musique, notamment électronique. Le tout étant situé entre Limoges et Oléron. L'humour (involontaire?) ponctue aussi ces récits, lorsque le narrateur misanthrope devient féroce avec les autres ou lorsque son autodérision fait des ravages. Car, à le lire, une chose est certaine: le sexe "faible" n'est certainement pas celui des femmes, qu'il sait aimer et dont il connaît parfaitement l'intime géographie, tout en sachant se rendre parfaitement énervant, avec ses multiples névroses. 
On note la présence de quelques "hasards objectifs" - parfois dissimulés sous l'appellation "anecdotes" - et l'ouvrage s'achève par un chapitre épistolaire lui donnant des allures de Liaisons dangereuses contemporaines. La vie coule, en effet, et le style de Marc Bruimaud aussi, qui donne envie de le lire du début jusqu'à la fin sans interruption, ce qui n'empêche pas de réfléchir avec lui à propos de la carte du tendre dans toute sa complexité, ses difficultés et ses plaisirs sans cesse recommencés. 
Dans les années 1980, Bernard Cubertafond, un autre écrivain limougeaud s'était essayé - dans un style différent - à écrire deux volumes de ses Chroniques d'un homme libéré ; je songe à lui en lisant Bruimaud, par la proximité du thème, mais aussi des lieux, entre Limoges et océan. 

1 commentaire:

  1. Merci, cher Laurent, de ta fidélité... Pour ce qui est de l'humour, je ne sais pas trop à quels passages tu fais allusion, mais il y a tout de même quelque chance qu'il soit volontaire !

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